Concevoir et promouvoir un voyage avec un influenceur

Le Cas de Morgane Trussardi (alias Little Gypsy),influenceuse voyage, et Barbara Roussel de l’agence Voyages Couture

Les influenceurs voyages ont un pouvoir de prescription. S’ils peuvent réaliser des reportages sur des destinations et donner envie à leur audience de s’y rendre à son tour, ils ont aussi un contact direct, et par definition, un pouvoir d’influence auprès de dizaines de milliers de personnes au quotidien. Si les agences sont restées longtemps frileuses à l’idée de collaborer avec ce profil émergeant, qui pouvait fragiliser leur travail d’intermédiaire entre le voyageur et la destination, de plus en plus de voyages blogueurs sont désormais sponsorisés par des agences pour profiter d’un coup de projecteur. Une agence a été plus loin dans la collaboration influenceur, précurseur du concept, Voyages Couture, agence de voyages sur-mesure marseillaise a lancé en 2018 le premier voyage d’abonnés pour la communauté de la blogueuse voyage Little Gypsy. Interview croisée.


  • Barbara, Morgane, comment vous-êtes vous rencontrées ? Comment ce projet est né ?

Barbara, Voyages Couture : C’est Stanislas (de Travel Insight) qui nous a mis en contact. Mon idée c’était à la base de faire connaître Voyages Couture. J’avais fais une première opération avec des influenceurs (un blogtrip) et j’étais partante pour une nouvelle opération. Je suivais déjà Morgane, j’aimais sa ligne directrice, le fait qu’elle ne soit pas lisse, qu’elle soit différente, très engagée, et j’adorais son humour.

Premier contact par téléphone, nous étions partante toutes les deux pour un projet commun. Morgane avait l’idée du voyage avec ses abonnés. Il fallait définir nos attentes, nos envies… On s’est rencontrées peu après, on a passé une super journée ensemble à discuter du projet mais aussi de nos profils, nos parcours, et ça a super bien collé dès le départ. Morgane c’est mon coup de cœur pro, un vrai coup de foudre. C’est une personne magnifique, merveilleuse avec un grand cœur.

Morgane, Little Gypsy : J’avais l’idée depuis longtemps de faire des voyages avec mes abonnés. Les agences auxquelles j’avais proposé l’idée voulaient vendre des voyages très chers à ma communauté pour surfer sur le fait de voyager avec moi. Par exemple, on m’avait proposé 4500 euros pour un voyage en Thaïlande. Je respecte et j’aime beaucoup trop ma communauté pour proposer un tel prix.

J’avais donc laissé tomber l’idée de ce projet jusqu’à ce que Travel Insight me dise un jour : « Tu n’aimerais pas voyager avec tes abonnés ? Je peux te faire rencontrer une agence avec qui tu vas bien t’entendre ». C’était Barbara, et dès le premier appel, ça a été le coup de foudre. Mêmes valeurs, mêmes envies, mêmes ambitions !

  • En quoi consistait cette opération de voyage avec sa communauté ? Quelle a été votre implication à chacune ?

VC : L’idée c’est de vraiment coller aux voyages qui ont touché, marqué Morgane, qui sont un peu sa marque de fabrique ! Donc les programmes ont été définis par Morgane, et je me suis occupée de la logistique, de la mise en ligne. Ensuite on validait tout ensemble. Un vrai travail d’équipe. Et toujours dans la bonne humeur.

Et Morgane en a ensuite fait la promo à  sa communauté.

LG : Je voulais vraiment transmettre un voyage, une passion et un pays que je connaissais déjà. Leur faire vivre avec moi ce qu’ils avaient déjà vu en vidéo. Je m’occupais de dire à Barbara ce que je voulais leur faire découvrir, les activités, les villes, les lieux, etc. Et Barbara s’occupait de toute la logistique, réservations des hôtels, des avions, des voitures, et du coût total pour chaque voyageur. Ensuite, on s’appelait et on discutait de tout cela ensemble pour donner quelques jours plus tard le package du voyage avec tout l’itinéraire et les jours sur place.

  • Quels sont les indicateurs de succès de cette opération ?

VC : On ne s’y attendait pas ! Le premier soir, le serveur a planté. Mon site n’était pas en mesure d’avoir une telle activité ! C’était le flip total, on s’appelait, on était super stressées. Il fallait trouver les solutions sans délai.

Le succès était tel qu’il y avait même des listes d’attente. Il a fallu rajouter une date de départ pour le voyage en Colombie Britannique prévu la première année. Honnêtement, je ne m’attendais pas à un tel succès. Morgane a fait l’annonce un samedi, j’ai passé le dimanche à envoyer les bulletins d’inscription, à répondre aux questions de tout le monde. C’était fou !

LG : Dès le premier jour de l’annonce, le site internet a planté tellement il y avait de monde connecté. Nous avons eu également toutes les sessions remplies à chaque voyage et des gens sur liste d’attente pour l’année suivante. Si je le pouvais, avec le succès de ces voyages, je ne ferais que ça avec Barbara !

  • Pourquoi cela a fonctionné selon vous ?

VC : Les voyages ont vraiment été créés à l’image de Morgane. Je n’ai pas imposé ce qui m’aurait arrangé, ou ce que j’aurai voulu mettre en avant.

Et nous avions vraiment les mêmes valeurs, la même idée finale : faire plaisir, et se faire plaisir en ce sens !

Nous sommes restées sur son identité, et Morgane ne triche pas !

Sa communauté se retrouve en elle, avec elle… D’ailleurs, les plus beaux succès des voyages « des petits bâtards » ont été les voyages orques en Norvège ou en Colombie Britannique. Parce que c’est clairement l’identité de Morgane… On vit le voyage avec elle, la rencontre avec les orques… On a les yeux qui brillent, rien que d’y penser. J’aurais adoré participer à l’un des voyages… Mais je le vis à chaque fois avec elle. Elle m’appelle, elle pleure, elle crie, elle m’envoie des vidéos… Et je pleure aussi. C’est très fort à chaque fois.

Clairement, c’est une aventure humaine, et pas une opération marketing. Je me rappelle de Morgane qui me disait « C’est aussi donner la chance à des personnes qui n’osent pas voyager seuls, et qui ne veulent pas d’un voyage en groupe traditionnel. »

J’ai eu des parents qui m’ont appelée pour me dire « ma fille veut partir avec Little Gypsy, est-ce bien sécurisé, est ce bien organisé ? ».

C’était différent de tout ce qui existait jusque là. Complètement différent d’un voyage classique sur mesure comme je peux le faire en temps normal.

LG : Parce qu’avec Barbara, notre principale motivation était humaine. Nous n’avons pas cherché à gonfler les prix des voyages pour gagner énormément d’argent. Nous voulions rendre des gens heureux grâce à notre passion en commun et que cela reste accessible. Parfois, j’étais en pleurs au téléphone avec Barbara pour lui annoncer que les abonnés avaient réussi à voir les orques, ou qu’on avait vécu telle ou telle chose.

Notre entente et le fait que nous avions les mêmes attentes et valeurs a beaucoup joué aussi. Ce n’est plus une collaboration à mes yeux mais un projet commun avec une amie aujourd’hui. Et ça se ressent je crois.

Je pense aussi que de la même manière, j’ai toujours été authentique et sincère avec ma communauté, ce qui fait qu’elle me fait confiance et a envie de voyager avec moi.

  • Quelles étaient vos craintes, quelle est la limite d’une telle opération ?

VC : Dans un premier temps, avant le lancement de la 1ère édition, c’était que ça ne marche pas vraiment. Nous étions dans le flou total. Ensuite c’était la difficulté du voyage en groupe, différent du voyage en individuel. Les personnalités de chacun…

Après j’ai eu une grosse frayeur pour le voyage en Norvège. 10 personnes allaient nager avec des Orques ! Et là le gros flip !

Ok, tout est ficelé, tout est cadré, mais quand même !

LG : Moi, j’avais peur de me retrouver avec des gens avec qui ça ne se passe pas forcément bien. Mais en réalité sur les 7 voyages, beaucoup sont devenus des amis et un seul voyage s’est mal passé de part la personnalité des certaines personnes qui a tiré le groupe vers le bas. Je dirais donc que la limite ce n’est de malheureusement pas pouvoir prendre tout le monde et devenir sélectif pour que le groupe vive pleinement un voyage dans la joie et la bonne humeur.

J’avais peur aussi au début de ne pas réussir à animer un groupe de 10 personnes car c’est un métier mine de rien, et il faut donner énormément d’énergie. Mais au final j’adore faire cela ! J’ai la chance d’avoir fait d’autres métiers comme professeur d’équitation où l’animation des groupes était 90% du travail, ça a très vite refait surface.

  • Vous avez réalisé plusieurs éditions, pensez-vous reproduire l’opération à l’avenir ? Peut-être sur d’autres thèmes ?

VC : Un voyage était prévu en août, les vols sont bloqués, les hôtels aussi mais avec le Covid-19, il est un peu compliqué de se projeter.

Changerions nous de thèmes, je ne pense pas… Nous avions bien quelques idées un peu différentes, mais toujours dans l’idée des voyages phares de Morgane. On en reparlera ! Mais oui, c’est toujours prévu. Et il y a pas mal de demandes sur le sujet !

LG : Nous allons continuer oui. Nous devions sortir une nouvelle édition en Colombie Britannique avec les orques mais malheureusement avec le Covid tout est un peu mis entre parenthèses.

  • Le mot de la fin, selon vous : Agence de Voyages et influenceur, mariage qui dure ou mariage éclair ?

VC : Avec une même vision et des envies communes, ça ne peut que durer ! Je dirais même qu’on évolue ensemble.

C’est après la rencontre avec Morgane, que j’ai modifié la ligne directrice de certains des voyages proposés à mes clients. C’est à ce moment-là que j’ai fait en sorte de revoir certaines prestations que nous proposions jusque-là. De privilégier des prestations avec une vraie éthique, et de refuser de proposer des attractions touristiques allant à l’encontre totale du bien-être animal.

Et je le redis, Morgane c’est mon coup de cœur pro… Alors oui je ferai en sorte que le mariage dure encore longtemps 😉

LG : Si l’agence reflète les valeurs de l’influenceur et vice-versa, c’est un mariage qui dure !

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